Lâcher prise : difficile mais nécessaire
Au milieu du rush et de la fatigue de la rentrée, Christopher a voulu nous parler de prise de recul. Il est facile dans cette période de se sentir « sous l’eau » et d’avoir l’impression de ne plus pouvoir faire face, dans une ambiance qui favorise les erreurs de décision. La question, la vraie, on ne se la pose pas facilement. Savons-nous vraiment quand « lâcher l’affaire » ?
Il s’agit avant tout d’accepter de s’être trompé, d’accepter l’impermanence des choses, accepter que quitter n’est pas perdre et surtout, accepter de voir ce que l’on gagne plutôt que ce que l’on perd.
L’acceptation est au centre de tous nos process de décision. Nous sommes tous soumis à de nombreux biais mais aussi à nos croyances et à nos schémas mentaux. Ces derniers nous empêchent souvent de voir les choses telles qu’elles sont, de prendre le recul nécessaire sur une situation pour admettre qu’il est temps de changer, de renoncer, de partir… de s’ouvrir à de nouveaux horizons.
En y réfléchissant, je réalise qu’en ce qui me concerne je suis assez à l’aise pour prendre ce type de décision, notamment lors d’une course (nous y reviendrons), donc à court terme et avec « peu » d’implication émotionnelle. À l’inverse lorsque ce sont des choix majeurs, tant au niveau professionnel que personnel, je suis le roi de l’immobilisme…un peu trop résilient peut être ? Il me semble que ce n’est pas un atout quand il s’agit de se mettre en mouvement pour s’extraire d’une situation, ou d’une personne, « nuisible ». C’est un biais très commun : ne pas être assez à l’écoute de soi, de ses intuitions ou des signaux que nous envoie notre quotidien.
(Se) faire confiance pour initier le changement
En psychologie, on dit que pour initier un changement il faut que la situation antérieure soit devenue « insupportable ». Tant que la balance bénéfice/risque nous semble pencher vers la situation présente, impossible ou presque de bouger. Et pourtant…
Dans toute relation et aventure professionnelle ou personnelle, il y a ce moment clé. Celui qui vous dit qu’il est temps de partir, de couper les liens. Avoir la capacité de le percevoir est essentiel à l’épanouissement de tout un chacun ! C’est un trait de caractère que j’admire particulièrement. Trait de caractère ? Pas seulement ! Nous connaissons tous des gens qui ont cette capacité incroyable à se jeter à l’eau sans avoir peur. À se lancer dans des défis incroyables, à partir sans se retourner, à changer de vie ou de carrière en un claquement de doigts. Je suis intimement convaincu que le point commun de ces personnes est la confiance, celle qu’ils ont en eux comme celle qu’ils ont en la vie.
Lors de notre entretien pour notre podcast Dans la tête d’un leader (épisode à retrouver sur notre site internet), Isabelle Autissier m’expliquait comment, au sommet d’une carrière émérite de skipper de course au large, elle a décidé d’arrêter pour se tourner vers de nouveaux horizons. En l’occurrence, son combat pour la préservation de la planète et l’écriture. Elle est devenue présidente du WWF et auteure à succès. Sans se retourner, elle avait pris sa décision. Celle de changer de vie, de se consacrer à de nouveaux rêves, de se lancer de nouveaux défis. Ce n’était pas parce que la situation précédente était inconfortable ou insatisfaisante mais parce qu’elle avait confiance en sa capacité à réaliser.
La confiance, ça se travaille
Cette confiance nait avant tout dans l’enfance par l’éducation et la relation de sécurité créée par les parents. Néanmoins, elle se construit aussi et elle peut se travailler. Dans son article « Do You Know When to Give Up? », paru ce mois-ci dans le Harvard Business Review, Dina Smith nous suggère quelques stratégies pour parvenir à bouger lorsque nous restons scotchés dans une situation qui ne mène à rien :
- Se concentrer sur les gains et non sur les pertes. Lorsque nous avons beaucoup investi dans un job, une entreprise ou un projet, il est extrêmement difficile d’y renoncer. Cela peut mener à s’enfoncer sans s’en rendre compte dans une situation nocive. Ce mécanisme est lié au biais d’aversion à la perte mis en évidence par Kanheman et Twerski.
En course, il est toujours très difficile d’accepter que l’on a fait un mauvais choix stratégique. Pourtant, la meilleure manière pour faire en sorte que ce mauvais choix ne soit pas irrémédiable est de l’accepter. Il faut ensuite se replacer et accepter la perte pour la minimiser et être en capacité de re-jouer à nouveau.
- Prendre conscience de ce qui dépend de nous ou pas, et rester concentrés sur ce sur quoi nous pouvons agir.
En course nous ne commandons pas les éléments et nous ne maîtrisons pas ce que font nos concurrents. Lorsque les choses tournent mal, j’essaie de me concentrer uniquement sur ce sur que quoi je peux agir : faire avancer mon bateau, exploiter au mieux les conditions que j’ai sur le moment, être dans le moment présent. Pour approfondir le sujet, je vous invite à lire notre article Philosophie de l’amertume.
- Prendre conscience que nous ne sommes pas ce que nous réalisons, que même dans un « échec » se cache de nombreuses réussites et accomplissements. À mon sens, il est ici aussi question d’ego. Moins vous en avez, plus vous êtes alignés et conscients de qui vous êtes, moins il sera difficile de passer à autre chose.
- Consulter des mentors ou des proches extérieurs à la situation, pour avoir un avis émotionnellement neutre. Il s’agit avant tout de contrer nos propres biais, pour nous extraire de notre bruit intérieur (le fameux Noise dont je vous parlais en juin).
Lors de décisions stratégiques importantes, il faut savoir s’entourer. Des personnes issues de différents horizons, avec des compétences et personnalités diverses permettent de contrer l’effet du biais et du bruit individuel dans la décision.
- Enfin, faire preuve d’auto-compassion.
Lorsque les choses ne se passent pas comme prévu, la première réaction est souvent de se remettre en question. En prenant du recul, nous réalisons que de nombreux facteurs entrent en considération. Souvent, nous pouvons avoir joué notre meilleur jeu sans pour autant gagner. Nous avons donné le meilleur de nous-mêmes, l’heure n’est donc pas à la remise en question mais à la préparation de la suite.
Et comme le dirait Nelson Mandela : « Je ne perds jamais. Soit je gagne, soit j’apprends. »
Alors le changement, c’est maintenant 😉
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