En direct de l'IMOCA Charal sur la Transat Jacques Vabre
MARSAIL vous emmène à bord de Charal ! Le duo Pratt/Beyou s’est lancé à l’assaut de la Transat Jacques Vabre 2021 le 7 novembre dernier. Tout au long de la mythique course, Christopher vous fait vivre la course en direct depuis l’IMOCA par ses carnets de bord pour La Provence. Des mots qui ont voyagé, nés entre les pontons du Havre et les vagues de l’Océan Atlantique. C’est son dernier carnet de bord de la Transat, entre la joie d’avoir retrouvé la terre et la tristesse d’avoir quitté la mer.
Épisode 5 : les pieds sur terre, la tête encore un peu en mer
Le retour à la civilisation — au monde réel — est toujours un moment particulier. Un moment que tu espères, dont tu t’impatientes quand l’arrivée approche, mais que tu redoutes un peu aussi. Parce qu’en mer, nous sommes libres. Parce qu’en mer, nous sommes dans l’élément. Parce qu’en mer, nous sommes loin de l’agitation terrienne, de l’inutile.
À l'approche de l'arrivée, le doute : faut-il vraiment rentrer à terre ?
Hier, à l’approche des côtes martiniquaises, et alors que cela faisait au moins trois jours que je n’avais qu’une seule obsession – l’arrivée – j’ai commencé à douter. Je me suis dit que nous étions mieux en mer, mieux plongés dans les éléments qu’au sein d’une civilisation qui souffre, qui déraille, qui dérape. Il est vrai que les premières odeurs que nous humâmes furent celles des pneus qui brûlaient dans Fort-de-France… Comme une alerte, comme un signal qui nous met en garde : « Attention, vous quittez la paix, vous laissez derrière vous l’océan pour la civilisation embrasée ». Et puis, les lueurs de la ville vous ramènent. La lumière du bateau comité matérialise la ligne d’arrivée. Elle est là. On la distingue. Enfin. Le son de la voix de l’organisateur coupe la nuit noire et se détache de cette même ligne. Plus que quelques mètres. Plus que quelques secondes. Elle est là. Nous passons la ligne. Tout s’arrête.
Et finalement, la douceur de retrouver les éléments terrestres
Quelques flashs. Deux membres de l’équipe montent à bord. Nous passerons la nuit avec eux en attendant la levée du couvre-feu. Nous venons d’apprendre le protocole d’arrivée spécial dû à la situation sur l’île. Encore une nuit en mer. Ainsi, nous rallions quelques heures ce sas de décompression. Il nous permet d’accoster en douceur. Il nous offre de retrouver les premiers plaisirs terriens : des boissons fraiches, une salade de légumes, un peu de savon et d’eau douce pour se laver. Nous reprenons forme humaine pour ressembler à nouveau à nos congénères. Puis, le jour se lève, au petit matin, nous sommes prêts à retrouver la vie, à rejoindre sponsor, équipe, famille, amis. Nous avons hâte de partager avec eux ces moments précieux de liberté en mer que nous avons la chance exceptionnelle de vivre… Partager, oui. Profiter de la vie terrestre, oui. Mais déjà, regarder devant, plus loin, là-bas sur l’horizon : la prochaine course, le prochain départ en mer. Quand ? Bientôt ? Bientôt.
À ce moment-là, je pense au film préféré de mon enfance, Le Grand Bleu. Je me rappelle les mots de Jacques Mayol « Il faut trouver une bonne raison pour remonter. Parfois, j’ai du mal à en trouver une. »